dimanche 9 mars 2008

Littérature-17e/18e-La question dramatique

LA QUESTION DRAMATIQUE

I. Position du problème

Au 17/18e siècles la dramaturgie de l'intrigue se base sur la dramaturgie de l'action, d'après la Poétique d'Aristote qui est la référence depuis 1550. Mais c'est un texte incomplet (le volet sur la comédie est perdu), ce ne sont que des notes sur les cours donnés à ses élèves.
L'action pose problème chez Aristote.
Action = mythos > fable
C'est donc un terme ambiguë puisqu'il désigne à la fois le sujet d'une pièce et la manière de la construire.
Aristote ne définit pas le terme. Cependant l'action doit être orientée (cf polycop, chap 7)

A partir du 16e siècle sont publiés une série de textes théoriques.
Pelletier du Mans, Scaligner, Jean de la Taille théorisent les notion d'unité, d'action, moteur de la tragédie = terreur et pitié
Laudun d'Aigalier et de la Fresnaye, en marge théorisent la tragi-comédie (genre bâtard) où l'action est plus libre.

Deux textes de Chapelain
La Mésnardière systématise Chapelain. L'Abbé d'Aubignac reprend La Mésnardière, ce sont les trois vrais législateurs du classicisme. Ils mettent en place les notions de vraisemblance, conflit, unité.
Corneille propose un examen de ses pièces. Il parachève ainsi l'oeuvre des trois législateurs en la discutant en comparaison de toutes ses pièces.

Au 18e siècle les théoriciens s'interrogent sur le moyen de renouveler le genre.
Houdar de la Motte > unité d'intérêt, tragédie en prose
Voltaire > question de la tragédie nationale, tragédie exotique, tragédie sans amours, tragédie shakespirienne
De Belloy systématise Voltaire et la tragédie historique.

= flottement terminologique (indécision par rapport à la traduction d'Aristote). L'action dramatique est souvent perçue selon des plans différents.
L'action est définit par rapport à la temporalité, concept philosophique ou notions esthétiques.

II. Comment définir l'action dramatique selon les classiques ?

Marmontel, 1787, Éléments de littérature, fait une synthèse.
L'action fonctionne sur un double plan : la fable et l'intrigue
fable : sujet, histoire, action > inventio
intrigue : agencement de l'action, narration > dispositio

Ce qui débouche sur un double régime de l'action :
- une structure profonde (principe dynamique)
- une structure de surface (manifestations concrètes de cette action et de cette dynamique)

Dire c'est faire, parler c'est agir au théâtre : valeur performative du langage théâtral.
Conséquence : on va définir une dramaturgie de l'intrigue (du latin intricare > embrouiller)
L'action est définie selon une orientation > début/milieu/fin // Exposition/noeud/dénouement // Protase/épitase/Catastrophe
L'orientation véhicule une idée de renversement, de fortune.

Catalogue d'éléments : conflits familiaux, rivalité, inceste = manifestations concrètes de l'action qui vont reposer sur des rapport s dialectiques privilégiés (jeux d'opposition > rapports de force) : équilibre/déséquilibre ; tension/attente; sur le rythme : pause/enchaînement.
Ce sont des situations types que le spectateur va voir avec plaisir : tension extrême, coup de théâtre (la reconnaissance par exemple), deus ex machina ; le récit est une pause dans l'action.
L'action présentée est différente de l'action racontée (ellipse, récit, action externe > faits ; actions internes > dilemnes ; action collective/action privée ; action simple/action complexe)

III. Construction de l'action ("plan", "conduite de l'action")

Définition de Marmontel (cf photocop)

1. Principes esthétiques
L'esthétique se superpose à l'éthique

- La vérité : on distingue une action vrai (l'histoire) d'une action feinte (qui aurait pu arriver)

- La vraisemblance : ce qui découle de la mimesis (imitation améliorée de la nature).
Vraisemblance ordinaire : ce qui arrive plus souvent que son contraire
vraisemblance extraordinaire : ce qui arrive moins souvent que son contraire
C'est un concept ambiguë : confusion entre ce qui se passe sur scène et l'action elle-même > problématique de l'illusion.
Concerne à la fois le sujet et la manière dont on le déroule.
Contradiction : Boileau "le vrai n'est pas toujours vraisembable"

- La nécessité : une action est nécessaire quand elle n'est pas libre. Ceci garanti la cohérence de l'intrigue. Idée de concaténation des actions.
Il faut distinguer :
le nécessaire de besoin : logique d'un fait
et
le nécessaire de poète : coup de théâtre vraisemblable qui permet à l'action de se modifier hors de sa logique.
ex : deux ex machina (qui est proscrit par le théâtre mais fait parti du théâtre)

- L'intégrité : une action doit former un tout organisé expo/noeud/dénouement

2. Principes poétiques
Les unités : unité de temps, de lieu n'ont jamais posées de problème. C'est plus complexe pour l'unité d'action.
L'unité d'action est la pierre angulaire de la discussion sur le théâtre régulier contre le théâtre irrégulier (tragi-comédie).
Il faudrait parler unification de l'action : l'action est unifiée si elle répond à différents critères :
- fils intriciels noués sans qu'il soit possible de les disjoindre. Ils doivent être interdépendant, aucun ne peut être enlevé.
- fils secondaires (appelés épisodes) trouvent leur principe dès l'exposition et découlent de l'action principale.
- aucun événements ne doit être dû au hasard (différents du roman).
Dans la pratique c'est différent quand on prend en compte le goût du publique.

Cette idée d'unité d'action a eu trois épisodes :
- unité de principe : l'action est une quand ses éléments ont un même point de départ et convergent vers un même centre.
- unité de péril (Corneille) : l'action est une quand le personnage principal du début à la fin est dans un même péril (contre exemple : Horace)
- 18e siècle > unité d'intérêt : sorte d'assouplissement de la règle de Corneille, l'action est une quand un personnage concentre sur lui l'intérêt du spectateur (contre exemple : Andromaque)

Distinction entre action simple/implexe et complexe
- simple : situation initiale > csq 1> csq 2 > etc > dénouement. C'est linéaire, c'est une dramaturgie simple.
- implexe : situation initiale > csq 1
> csq 2 > csq 3
Schéma buissonant (dramaturgie baroque)
- complexe : plusieurs situations initiales donnent un schéma buissonant > arriver à l'imbroglio, hypertrophie de baroquisme à la limite du genre régulier (coïncidence hasard). Plus dans le goût du spectateur.

Les auteurs sont tiraillés entre la théorie (être reconnu) et la pratique (goût des spectateurs, plaisir du théâtre, résultats économiques).

Conduite de l'action
= Règle de division en cinq actes (Horace intermédiaire avec Aristote) formule de la tragédie et grande comédie.
Les actes sont séparés par des intermèdes
Chaque acte est une réplique miniature de la pièce (avec début, milieu et fin) > sorte de mise en abîme.
Les scènes sont délimités par les entrées et les sorties des personnages (apparaît avec d'Aubignac, il détermine les liaisons de scène)
Tragédies = constance entre scène et nombre de vers (1500-1800) > attention du publique (1h10 - 1H20)
Mais c'est aussi une question matérielle > remplacement des chandelles et sortir avant qu'il fasse nuit pour éviter les voleurs et les méchants.
Plus le nombre de scènes est élevé, plus le rythme est rapide : mouvement perpétuel des personnages.

Principe de crescendo/décrescendo (unité rythmique)
scène à climax, souvent des coups de théâtre

3. Structuration des actes et des scènes

- Actes : Équilibre entre les actes, ils doivent contenir à peu près le même nombre de scènes. On doit avoir au moins un climax (une scène à effet) dans chaque acte.
La dernière scène d'un acte débouche sur un trou : l'entracte.
Il faut que l'intérêt soit maintenu > suspens. Souvent c'est la scène où on prend des décisions.
On ne peut retrouver le même personnage à la première scène de l'acte suivant.

- Scènes : en fonction des entrées et des sorties. Les personnages secondaires créent se mouvement là.
Il existe différents types de scènes : climax/relache (monologue), scènes d'action, scène de liaison (pour permettre à la reine de venir avec ces 80 kg de robe).
Une scène a elle aussi un début, un milieu et une fin. Le climax peut être n'importe où, il peut même y en avoir plusieurs.
Scènes de délibération à la fois statiques et actives. Scène de jalousie, de duo amoureux.

4. De quelques formes de l'écriture dramatique liée à la problématique de l'action

"parler, c'est agir" > tyrannie de la tirade (mettre en valeur le style de l'auteur et aussi moyen de tirer l'attention sur l'auteur)
La tirade doit produire un effet > modifier l'action
ex : Acte IV, scène 5 Iphigénie : plaidoyer structuré comme un morceau de rhétorique : exorde, narration/proposition, affirmation/réfutation, péroraison.
Le récit est différent de l'idée d'action > tend vers le statisme, il est différent d'une dynamique, il ouvre sur quelque chose qui n'est pas sur scène (deux fois contradictoire avec le principe d'action). Mais il est toléré : on trouve des récits protatiques, oniriques, de dénouement.
Moyen rhétoriques de déguiser le récit : un autre personnage va venir le couper ("récit interrompu"). Rhétorique de l'hypotypose.
La problématique du récit est assez proche de la problématique du monologue. Le monologue est très employé dans la dramaturgie classique : c'est une pensée verbalisée, elle se distingue donc de l'action. Les auteurs essaient d'en faire un faux dialogue ou renforcer son côté artificiel.
Cas particulier des stances : entre le monologue, le récit et le dialogue.
Trois cas de figure du monologue : progression de l'action, pause dans l'action (elles servent souvent de liaison > c'est un critère de vraisemblance).
Excroissance de l'action : commentaire de l'action
Progression de l'action : délibératif ou commentatif
ex des stances l'action avance forcément
S'il est commentatif > informatif
l'aparté n'est pas signalée dans un texte classique ; lié au principe de la double énonciation dramatique, convention d'ordre méta-discursif, soulignement de l'action en train de se réaliser
les stichomythie : chaque réplique d'un dialogue est fondée sur un seul vers > accélération de l'action.

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